Catalogue des pigments traditionnels

Pigments utilisés de l’Antiquité à l’époque Moderne

La couleur bleue

 L’azurite

Azurite, Pierre d’Arménie, Bleu d’Allemagne, bleu bice ou bleu montagne.

L’azurite est un minerai de cuivre, un carbonate hydraté (contrairement à la malachite qui n’est pas hydratée).
On trouve de l’azurite dans de nombreux endroits, y compris en France, mais la plus belle est peut-être celle qui vient des Mont Atlas au Maroc.

Le broyage de l’azurite est facile, dans le sens où elle n’est pas dure, mais il faut prendre garde de ne pas la broyer trop finement, un tour sous la molette suffit. Le reste de la préparation consiste à sédimenter la poudre pour en isoler différentes granulométries. C’est ainsi que l’on obtient plusieurs tons d’azurite allant du gris bleuté (très fin) au bleu cobalt intense (grossier).
En peinture on utilise différemment ces granulométries : les couches préparatoires et les mélanges sont fait avec le grain moyen qui est toujours plus ou moins sale. Les couches supérieures se font avec un grain soit très fin (inférieur à 50µ) pour donner un bleu clair, soit plus gros (100 à 250µ) pour obtenir un bleu intense. Les grains très fin gris peuvent être utilisés pour la peinture des paysages lointains.

On rencontre l’azurite dans les situations suivantes :

Dans les manuscrits où elle est souvent utilisée avec le vermillon pour l’exécution des capitales et paraphes (alternance bleu et rouge) ;
Dans les manuscrits enluminés (couleurs bleues et mauves, parfois vert) ;
Dans la peinture a tempera (manteau de la Vierge, ciel et paysage lointain, dans les visages) ;
Dans la peinture à l’huile jusqu’au XVIIIe siècle.

Elle peut être mêlée à des laques rouge, à du jaune, du noir et du blanc.

L’azurite peut être synthétisée par précipitation de carbonate de cuivre avec sel ammoniac mais cela donne une poudre très clair. D’autres procédés industriels plus récents donnent d’assez bons résultats.

On a souvent reproché à l’azurite de verdir avant de s’apercevoir que les huiles jaunissantes verdissaient la couleur. Cependant il est possible d’observer des dégradations de ce type notamment a fresco.

Broyage et sédimentation de l’azurite
Broyage et sédimentation de l'azurite

 L’azurite mordancée est préparée au vinaigre, c’est une azurite épurée.

 Les bleus de synthèse. Comme dit plus haut on peut créer un pigment bleu similaire en composition à l’azurite, on distinguera : Le bleu Verditer obtenu par oxydation en présence de chaux et de sel ammoniac ; Les cendres bleues obtenues par précipitation de sulfate de cuivre avec la potasse et le sel ammoniac ; différents azur que j’appellerais cuproammonium obtenus par macération de vert de gris avec différents oxydants dont le sel ammoniac.

Le bleu d’Outremer et le Lapis-lazuli

Le lapis-lazuli est une roche très fréquemment utilisée en Orient pour la confection de pièces sculptées et de figurines.
Cette roche contient un minéral bleu intense : la Lazurite, proche de la Sodalite (bleu translucide inexploitable).
L’utilisation du lapis-lazuli donne un bleu pâle moins intéressant que l’azurite et inutilisable à l’huile. Il faut attendre le XIV-XVeme siècle pour voir apparaitre des recettes d’extraction de la Lazurite et donc de bleu d’Outremer. Cependant ces recettes côtoient des recettes permettant d’améliorer la couleur de la poudre à l’aide de laques organiques rouge.

Pour extraire la lazurite :
On réduit la pierre en morceau que l’on porte au rouge dans un creuset. Après avoir été réduite en poudre, celle-ci est incorporée à une pâte faite de différents matériaux : cires, résines, huiles, etc.
Ce mélange, sous forme de boulette, est laissé au repos avant d’être malaxé dans de l’eau chaude (pour l’amollir) puis dans de la lessive chaude. Après un certain temps le bleu est extrait de la sorte.
Contrairement à l’azurite on ne retrouve pas l’intensité de la couleur de la pierre. Bien sur il faudra partir d’une pierre très pure pour obtenir les meilleurs résultats.

Pour indication, un échantillon de 15 gr d’azurite donne environ 14/15 gr de poudre colorée en l’espace d’une heure ou deux, tandis qu’un échantillon identique de lapis-lazuli donnera environ 3 gr de poudre après plusieurs jours de travail. Ce rapport est conservé avec des quantités plus grandes sans modifier le temps de travail c’est pourquoi il vaut mieux préparer une assez grande quantité d’avance.

 Les frittes

L’Égypte ancienne à découvert une autre couleur qui se prépare par cuisson : le bleu égyptien ou fritte égyptienne. Il s’agit d’un silicate de cuivre obtenu par cuisson de sable et de cuivre à haute température et pendant plusieurs heures (voir 48h). Cette couleur perdura localement jusqu’au Moyen-Age.
Pendant la Renaissance on a utilisé une autre fritte en Europe : le smalt. Il s’agit d’un verre assez grossier bleu violacé. On cite également le smaltino, peut-être une version épuré du smalt.
La Chine a également son pigment bleu vitrifié : le bleu Han, à base de baryum.

 Le bleu de Cassius : il semblerait que plusieurs couleurs fassent intervenir l’étain dans une précipitation obtenue par dissolution de métaux dans l’acide nitromuriatique. Selon les métaux employés on obtiendrait différentes couleurs : bleu avec le cuivre ; pourpre avec l’or, etc.

La couleur verte

 La Malachite

La malachite est cousine de l’azurite, c’est un carbonate déshydraté. Comme l’azurite le broyage doit être relativement léger. La sédimentation est un peu plus délicate, il faut choisir celle que l’on trouve sous l’aspect réniforme, plus compact et ne contenant qu’assez peu d’impuretés.

 L’Atacamite est un minéral composé d’oxychlorure de cuivre de formule Cu2Cl(OH)3. C’est l’équivalent naturel du vert salé.

 Le Vert de gris & le Verdet : L’obtention du vert de gris est aisée puisqu’il suffit d’exposer des plaques de cuivre aux vapeurs de vinaigre (ou acide acétique).
La poudre obtenue n’est pas utilisable en l’état car instable. On procède donc à une recristallisation : on broie la poudre au vinaigre (ou jus de citron, potasse) et on laisse s’assécher. La couleur obtenue est appelée Verdet ou vert éternel.
Le vert de gris est utilisé pour la formation de mélanges colorées ou bien dans la préparation d’autres couleurs. Par exemple, le résinate de cuivre se prépare en mêlant le vert de gris à de la résine de pin.
On peut également stabiliser le vert de gris par l’intermédiaire du safran que l’on broie avec.

 Le Vert salé

Le vert salé se prépare comme le vert de gris mais il faut badigeonner les plaques de cuivre avec du sel (plus du savon ou du miel), différentes recettes distinguent dans ce cas le vert de Rouen du vert Grec etc.
La composition est différent car il s’agit alors d’un chlorure de cuivre et non pas d’un acétate.
Le vert salé peut-être mélangé au safran.

 Le vert ottonien est obtenu par oxydation du cuivre avec du sel et du nitre.

 La Calumétite est un chlorure naturel découvert très récemment (1963) de formule Cu(OH,Cl)2•2(H2O).

 Le vert russe est un carbonate de cuivre obtenu par oxydation du cuivre dans du lait caillé, celui-ci fournissant le calcium et l’acide organique.

 Les cendres vertes sont obtenus par précipitation du sulfate de cuivre avec la potasse. La couleur obtenu, très pâle, est proche de la malachite. Des variétés modernes sont obtenues avec d’arsenic, il s’agit des vert de Scheele, vert de Brunswick, vert de Vienne.

 Le Verditer est également un carbonate de cuivre artificiel obtenu par oxydation du cuivre en présence de chaux. Le manuscrit de Bologne cite un mélange de verditer et d’indigo.

 La Posnjakite est un sulfate de cuivre, Cu4(SO4)(OH)6•(H2O).

 La Chrysocolle est un silicate hydraté de cuivre, sa poudre est vert-bleuté claire.

La couleur rouge

 le cuivre rouge est cité par Eraclius, il s’agit de l’oxyde rouge de cuivre.

 la fleur de cuivre est citée dans un manuscrit de Montpellier (traduit par Jean-Pierre Rose). On emploie du cuivre, du soufre et optionnellement de l’alun de roche, peut-être pour obtenir un oxyde de cuivre.

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